Un voyage est une suite de décisions complexes (pas juste "où on mange ce soir?" là...). Vous vous souvenez qu'on avait dû changer notre itinéraire une fois à San Pedro de Atacama en raison du fait que la neige bloquait la route logique vers Uyuni en Bolivie. En repensant notre trajet, on avait eu comme idée de descendre vers le Paraguay à partir de Santa Cruz en Bolivie, d'aller aux chutes d'Iguaçu, puis revenir par le nord de l'Argentine jusqu'en Bolivie. Ce plan nous aurait assuré qu'on puisse tout voir dans le tour à Uyuni car la neige aurait fondu, en plus de nous donner quelques jours de chaleur au Paraguay! Donc, on s'était dit qu'en arrivant à Santa Cruz on allait rendre visite au consulat du Paraguay pour obtenir quelques informations sur le visa (parce que oui, contre toute attente, les Canadiens font partie des 4-5 pays qui ont besoin d'un visa pour le Paraguay!). Et bien sûr, comme aucune information n'est à jour sur internet et qu'appeler est habituellement un cauchemar, on avait pas beaucoup d'autres alternatives que de passer au consulat... Bref, en arrivant à Santa Cruz après une nuit assez moche dans le bus, on s'est traînés dans un minibus vers ce le consulat. On a pu trouver le consulat, situé dans une tour d'appartements sans aucune indication, grâce à l'aide de bons samaritains dans l'autobus, dont un qui a tenu à nous accompagner jusqu'à la porte du consulat!
Pourquoi visiter le Paraguay? Franchement on se le demande... Il n'y a pas grand chose à y faire: 50% du pays est un gros marais, et le reste ne présente pas d'intérêt particulier à première vue... On voulait y aller justement parce que c'est très peu visité, que c'était grosso modo sur notre route, et qu'on aurait pu dire qu'on est allés au Paraguay. Toutefois, une fois au consulat, le visa de 75$ (alors qu'on y resterait quelques jours...) nous donnait soudainement moins envie, d'autant plus que le trajet en bus pour s'y rendre (Santa Cruz - Asuncion) dure 24h à travers des routes pourries et coûte une fortune. Bref, après avoir bien hésité, on a décidé que si on devait passer au Paraguay, ce serait au retour vers Santiago et non maintenant.
Ce point résolu, on a entrepris de trouver un hôtel; on a finalement arrêté notre choix sur un hostel situé dans une maison coloniale avec une cour intérieure pleine de plantes, et avec comme clou du spectacle, un toucan apprivoisé (tsé, ceux avec un grooos bec orange!). Le gros plaisir du toucan était de zieuter la bouffe des gens pour éventuellement leur piquer, ou de renverser les poubelles pour aller chercher la nourriture à l'intérieur. Comme nos plans avaient changé, on devait maintenant acheter un billet de bus pour aller à Sucre, la capitale historique de la Bolivie. On est donc retournés à la gare, où on a magasiné toutes les agences en éliminant d'emblée les compagnies de bus qu'on avait déjà aperçues et qui semblaient cacanes. Bref, armés de nos billets, on a enfin pu commencer à profiter de Santa Cruz.
Santa Cruz est la plus grosse ville de la Bolivie, sans en être la capitale. Elle est située dans les plaines qui bordent la forêt amazonienne: il y fait donc assez chaud (il faisait 30, en hiver)! Malgré le fait qu'elle soit très peuplée, c'est tout de même une ville agréable car les bâtiments sont bas, c'est comme une petite ville très étendue. Après un dîner où on a pu goûter au yuca (un genre de tubercule qui goûte la patate), on est allés voir la place centrale et la cathédrale. Les nerfs de Mémé ont lâché quand un employé s'est mis à tondre le gazon juste derrière notre banc sur la place. Pour ne pas créer un divorce avant le temps, on est donc allés faire une sieste à l'hôtel, dont François qui a commencé une idylle sur un hamac avec le toucan...
On a émergé du sommeil pour aller déguster un succulent hot-dog au coin de la rue, complet avec des morceaux de pâte frite et du maïs... Comme il fait toujours chaud à Santa Cruz, il y a des millions de restos de crème glacée! On avait justement aperçu une promotion 2 pour 1 pour du yogourt glacé avec plein de fruits pi toute: ce fut notre dessert sur la place centrale, bondée à cette heure-là.
Pour notre deuxième journée dans le coin, on s'était mis dans la tête d'aller vedger sur une plage d'une rivière amazonienne située dans un parc national à 2h de Santa Cruz. Après avoir cherché pendant un certain temps les taxis collectifs, on a roulé vers Buena Vista en compagnie d'autochtones du coin (comme toujours sans ceinture de sécurité, avec le dossier du siège qui tombait sur nous à chaque arrêt car le coffre arrière était surchargé...)! Buena Vista est un charmant village avec une place centrale pleine de palmiers et d'autres arbres tropicaux. Comme on cherchait une carte pour se rendre à la rivière, on a cherché en vain l'information touristique avant de tenter notre chance à la marie locale, où on monsieur super gentil a pris le temps de nous dessiner une carte. Les fonctionnaires boliviens bénéficient d'un environnement de travail beaucoup moins avantageux que chez nous: le bureau du monsieur avait un toit défoncé, des chaises sans dossier et un plancher sale où abondaient poussière, feuilles et toiles d'araignée! Munis des informations, on a marché dans les petites rues du village avant d'aller manger dans un des restos de la place.
Puis après, on a marché sur une route de terre qui quittait le village en direction de la rivière. Au début, c'était bien agréable, il y avait de nombreuses fermes, il ne faisait pas trop chaud car il y avait du vent et pas trop de moustiques! L'aventure a vraiment commencé après un embranchement où la route plongeait dans la forêt tropicale... En tant que Québécois, notre connaissance de la forêt tropicale est assez limitée; dans les premiers mètres de la route on a croisé un petit serpent, ce qui nous a fait réaliser qu'on était peut-être pas préparés à tout ce qui pouvait se trouver autour de nous... On a continué à marcher 1h de temps sur la route, en ne croisant quasiment personne, en cherchant un bled qui devait nous indiquer la proximité de ladite rivière. On a finalement jamais trouvé ni le village ni la rivière! Après un certain temps, on a rebroussé chemin, en s'informant auprès des quelques personnes qu'on a croisées (cliché amazonien: le gars qui taillait les fourrés de son terrain avec une machette)! En plus dans la forêt, il n'y avait plus de vent = moustiques = peut-être malaria...! Suite à une dernière tentative sur un autre chemin, on s'est rendus à l'évidence est on est rentrés au village bredouilles, complètement crevés, couverts de poussière et les jambes couvertes de piqûres de moustique... On a quand même apprécié l'expérience, mais il faut bien des échecs quelques fois en voyage!
Pour revenir à Santa Cruz, il fallait revenir à la place centrale de Buena Vista et faire signe aux taxis collectifs de s'arrêter. Cependant, aucun d'entre eux ne revenait directement à Santa Cruz. Après un moment, on a donc décidé d'en prendre un qui se rendait à un village intermédiaire, d'où on en prendrait un autre qui nous ramènerait à bon port. On a finalement embarqué dans un minibus presque vide, où il n'y avait qu'une petite famille: la grand-mère, la fille et le petit-fils. La grand-mère était une dame autoritaire et désagréable qui passait son temps à ramener à l'ordre (en hurlant d'une voix nasillarde) son petit-fils qu'elle appelait tour à tour "flaco" ("petit maigre") et "gordito" ("petit gros")! Une fois au village intermédiaire, la grand-mère nous a demandé si ça nous dérangeait qu'on arrête à l'hôpital pour qu'elle puisse aller à son rendez-vous médical!... On a donc passé un 15 minutes à l'attendre, puis on est passés voir des gens qu'elle semblait connaître dans le village, à qui elle a demandé de l'argent pour l'aider à payer ses médicaments pendant que Flaco jouait avec les conduites de gaz de la maison! Le chauffeur de bus, qui avait reluqué l'une des filles de la maison, s'est fait vite reprocher son geste par la grand-mère, par un cinglant "Tiene esposo, polla!" (ce qui se traduit à peu près par "elle a un mari, obsédé!"). En contrepartie de notre attente, finalement il semblait que le minibus se rendit aussi à Santa Cruz, donc on est restés pendant que la grand-mère nous abreuvait de conseils sur quel autobus prendre en ville et sur les choses à faire à Potosi. Enfin, le bus nous a laissés au milieu de nulle part, en périphérie de Santa Cruz, où on a pu prendre malgré tout un autre bus vers le centre! Après un frugal repas d'empanadas sur la place, on est revenus fourbus à l'hôtel.
Le jour suivant, on s'est levés tôt pour aller visiter le zoo de la ville, consacré à la faune de l'Amazonie bolivienne! Entre autres choses, on a bien aimé les perroquets qui répétaient tout ce qu'on disait (y compris les rires), François a été séduit par le singe-écureuil, on a été impressionnés par les jaguars et autres grands fauves locaux, on a vu un bébé capibara (le plus gros rongeur du monde, ça ressemble à un gros cochon d'Inde) s'enfuir pour aller se réfugier dans l'enclos des autruches, on a vu un paresseux se balader librement dans les branches des arbres du parc, on a encouragé les tortues dans leurs lentes et vaines tentatives d'escalader le parapet de leur enclos vers la liberté, on a regardé avec appréhension l'enclos des caïmans et des piranhas (de même que celui des serpents) en se disant qu'au Brésil, on allait peut-être les voir en liberté (!), on a trouvé cocasse que les lamas soient classés dans la catégorie "animaux de la ferme" au même titre que les moutons et les poules, on a constaté qu'un condor de proche, c'est plutôt moche et on a regardé un singe manger une banane avec une agilité ahurissante, en se souvenant que l'un de ces démons poilus avait bien failli nous voler notre caméra quand on était au Vietnam! Bref, on a bien profité de notre passage au zoo!
Pour le dîner, on allait rejoindre deux Crucenos, Ximena et Mauricio, que François avait connu l'an dernier quand il était en Bolivie. Ils nous avaient donné rendez-vous dans un restaurant où l'on sert de la bouffe typique de cette région du pays, la Casa del Camba (si vous passez par Santa Cruz, vous DEVEZ y manger, c'est vraiment délicieux!). Le diner a commencé à l'heure latine (i.e. en retard) parce que Ximena avait compris qu'elle devait passer nous prendre à notre hôtel, ce qui a valu à François des blagues sur la qualité de son espagnol teinté de chilenismos qui aurait été la cause du quiproquo!
Le dîner fut bien agréable, on a parlé politique bolivienne avec tout le cynisme que ça implique! Après, Ximena nous a emmené dans sa voiture faire un tour de la ville dans les quartiers plus riches en banlieue! En fait, elle est une rich kid bolivienne, sa mère est avocate et son père possède des terres en campagne. Bref, elle ne voyage qu'en avion (y compris à l'intérieur de la Bolivie) et elle a reçu une voiture de l'année à ses 18 ans...! Malgré tout, elle n'est pas hautaine et se dit socialiste! On est passés faire un tour chez elle puis elle est venue nous mener à l'intérieur du terminal d'autobus, où on a appris que le bus de la compagnie avec qui on avait des billets était resté pris je ne sais où, on devait donc changer de compagnie de bus (pour un prix plus cher, bien sûr!). En plus, on changeait pour un bus "normal", c'est à dire que le siège ne fait que s'incliner un peu, garantissant une nuit de marde... Après avoir changé à contrecoeur nos billets, on a dit au revoir à Ximena puis on est partis vers Sucre!
Tout juste sortis du terminal, un gars est entré dans l'autobus et a commencé à nous faire l'info-pub la plus complète et la plus longue à laquelle on ait jamais assisté! Sérieusement, ça a duré au moins une heure. Ça allait comme suit: "Qui mange du poulet ici? Qui mange du riz? Qui mange du quinoa? Vous voyez, on mange du poulet, du riz et des pâtes, rien d'autre: notre alimentation est mauvaise pour notre organisme! Notre estomac est une poubelle et il faut le nettoyer. Qui a mauvaise haleine ici? Qui a des gaz fétides? Qui s'endort durant la journée? Vous voyez: notre organisme est pollué! Heureusement, mon produit vous débarrassera de tout ça! ... ... ...". En fait, pendant tout ce temps-là, le gars a voulu nous vendre... des laxatifs à saveur de fruits. C'était probablement le pitch de vente le plus réussi pour ce genre de produits...!
Après avoir effectivement très mal dormi, trimbalés le long d'une route cahoteuse pendant 15h, on est arrivés à Sucre, pour retrouver le climat plus frais de l'Altiplano!
On peut dire que vos aventures sont variées. Serpents en liberté et grand-mère autoritaire, caïmans et laxatifs, tout ça n'arriverait pas dans la ville du maire Labaume! Mais j'espère que votre couple résistera aux tondeuses et aux toucans...
RépondreSupprimerJY
Pas étonnant qu'une compagnie d'autobus qui garantit "une nuit de marde" offre une infopub de laxatif...
RépondreSupprimerMM
La grand-mère bolivienne…c'était GM non?
RépondreSupprimerPoulet-Fritou (mon hamster) fait dire qu'il aurait particulièrement apprécié de se faire matcher avec le capiera…en tout cas!
GROS BECS
Marianne
C'est tellement plus élégant un toucan qui fouille dans les poubelles qu'un raton-laveur!
RépondreSupprimerBisous mes "flacos"!
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Anne-Julie